Séances Séance du 22 janvier 2021

– Communication de M. Christophe Grellard, directeur d’études à l’École pratique des hautes Études, Ve section, sous le patronage de M. Jacques VERGER : « Pierre Abélard et l’institution ecclésiale. Une ecclésiologie en tension ».

Résumé : Dans la dernière partie de sa vie, Abélard déploie une théologie morale dans laquelle l’accent est mis sur la disposition intérieure au péché et au mérite, accessible à Dieu seul, tandis que les actions extérieures sont dévolues aux institutions humaines, dans une perspective nettement juridique. L’Église ne semble pas, à première vue, faire exception. Abélard met ainsi en évidence une tension entre la conscience du fidèle et l’institution ecclésiale dans l’administration du salut, dont l’exemple le plus manifeste et le mieux connu est la tentative de limiter le pouvoir des clés dévolu aux évêques. L’enjeu de cette communication est de clarifier cette tension pour en montrer les raisons et les limites. En reprenant le parcours intellectuel et social d’Abélard, nous essaierons de montrer que la conception juridique de l’institution qui se dégage des œuvres des années 1130-1140 peut être mise en relation avec l’échec de l’idéal monastique, et de l’utopie communautaire qui l’accompagne, depuis la fondation du Paraclet (vers 1122) jusqu’à l’abandon de Saint-Gildas de Rhuys (avant 1132). Les réflexions d’Abélard sur l’Église, qui n’ont rien de systématiques, il faut le souligner, apparaissent ainsi comme symptomatiques de son évolution intellectuelle et de sa tentative inaboutie pour penser ensemble Dieu, la société et l’individu. 

Mots-clés : Église, moines, évêques, sacrements, religio

Abstract : In the latter part of his life, Abelard unfolds a moral theology in which the emphasis is placed on the inner disposition to sin and merit, accessible to God alone, while external actions are devolved to human institutions, in a clearly juridical perspective. The Church does not seem, at first sight, to be an exception. Abelard thus highlights a tension between the conscience of the faithful and the ecclesial institution in the administration of salvation, of which the most obvious and well-known example is the attempt to limit the power of the keys devolved to the bishops. The aim of this communication is to clarify this tension in order to show the reasons for it and its limits. By taking up Abelard’s intellectual and social evolution, we will try to show that the legal conception of the institution that emerges from the works of the years 1130-1140 can be related to the failure of the monastic ideal, and of utopia of an ideal community that accompanied it, from the foundation of the Paraclete (around 1122) to the abandonment of Saint-Gildas de Rhuys (before 1132). Abelard’s reflections on the Church, which are by no means systematic, it must be stressed, thus appear to be symptomatic of his intellectual evolution and his unsuccessful attempt to think God, society and the individual together. 

Keywords: Church, monks, bishops, sacraments, religio