Liens complémentaires
- http://www.ifporient.org/node/1219
- http://www.arscan.fr/vepmo/la-mesop… archeologique-soulaimaniah/
- http://archeologie.culture.fr/proch…
La mission archéologique française du Gouvernorat de Soulaimaniah (MAFGS), au Kurdistan irakien, a pour principal objectif la compréhension de l’évolution du peuplement en Mésopotamie du Nord sur les piémonts du Zagros central, du Paléolithique à nos jours.
Cette mission a été créée en 2012, à la demande du directeur des Antiquités du Gouvernorat de Soulaimaniah, M. Kamal Rasheed Rahem, afin de réaliser une carte archéologique du Gouvernorat dont il a la charge (fig. 1).
En s’appuyant sur la réalisation de cette carte archéologique, la MAFGS poursuit deux objectifs principaux :
1/ localiser et étudier les sites archéologiques et historiques afin de permettre à la direction des Antiquités de Soulaimaniah de les protéger. Cette carte lui permettra une meilleure gestion de son patrimoine régional.
2/ constituer un outil analytique performant pour répondre aux problématiques qu’elle s’est fixées : étudier les dynamiques de peuplement et leur évolution sur la très longue durée, définir les logiques de l’implantation humaine en lien avec l’environnement, comprendre les modalités des influences culturelles locales et régionales et les processus de diffusion des savoirs et des techniques dans cette région mal connue.
Durant ces 8 dernières années, la MAFGS a exploré environ 4 000 km² sur les 18 500 km² que couvre le gouvernorat. Les prospections ont commencé sur les districts du nord-ouest du Gouvernorat, Rania, Peshdar, Dukan et Bazian (fig. 2).
La MAFGS a ainsi pu localiser et cartographier plus de 500 sites archéologiques. Il s’agit aussi bien de nécropoles, de grottes, d’abri sous-roche que de tells ou de sites en aire ouverte (fig. 3).
La MAFGS a permis de multiplier par six le nombre de sites archéologiques anciennement connus pour ces régions.
Les premiers résultats montrent une situation complexe dans un petit espace assez enclavé, constitué de petites plaines et vallées entourées de crêtes montagneuses. Cet espace va changer de fonction selon les périodes : Il sera zone de passage, zone de contact ou zone de frontières. Les données spatiales, lithiques et céramiques dessinent une histoire locale complexe qui redessine complètement les anciens schémas de compréhension du peuplement du nord de la Mésopotamie. La région est tiraillée entre deux mondes : celui des plaines mésopotamiennes et celui des hauts plateaux iraniens.
Pour les périodes les plus anciennes, les montagnes abritent de nombreux abris sous-roche et grottes occupés dès le paléolithique moyen. La plaine, quant à elle, est occupée de façon certaine à partir du Paléolithique supérieur.
Au début du Néolithique, de petits villages occupent les plaines fertiles. Leur nombre et leur taille augmentent petit à petit jusqu’à former de vastes villages au Chalcolithique récent. Ces derniers seront réoccupés aux périodes ultérieures et s’agrandiront, se complexifieront pour former de petites villes à l’âge du Bronze. Autour de ces petits centres urbains va se développer une toute nouvelle organisation territoriale de type centre-périphérie très hiérarchisée. Les plus grands centres vont occuper des positions stratégiques, contrôlant des grands axes de circulation et de petits sites satellites vont apparaître gravitant autour d’eux, comme si nous avions spatialement des petites entités territoriales s’apparentant à de petits royaumes locaux.
À l’époque néo-assyrienne, l’organisation spatiale diffère fortement de celle de la période antérieure. La région n’est plus divisée en petits royaumes mais semble former un ensemble structuré autour d’une nouvelle fonction, celle de zone tampon. La région en effet se situe à la bordure septentrionale de la frontière impériale. La région est fortement occupée, les grands centres de l’âge du Bronze survivent pour la plupart, mais en parallèle se développe tout un chapelet de nouveaux sites à la situation et aux fonctions spécifiques : petits centres urbains, petits centres agricoles en plaine, sites-citadelles sur les hauteurs, dominant la plaine. L’ensemble de ce paysage devient plus uniforme et semble n’être plus que polarisé par un seul immense complexe urbain de 60 ha, Qalat-i-Dinka . Cette cité, située à proximité de la frontière, contrôle l’axe principal qui mène à l’empire voisin, et donc tout le territoire.
Aux époques séleucide, parthe et sassanide, l’organisation territoriale se trouve de nouveau modifiée. Le grand centre urbain néo-assyrien périclite alors qu’apparaît une grande cité fortifiée sur la cluse du Zab qui sépare les deux districts actuels de Rania et Peshdar. Il s’agit de Qalat i Darbant . Toute la région est polarisée et contrôlée par ce centre urbain, qui n’est autre que la capitale régionale des empires séleucide puis parthe puis sassanide.
À la période islamique, nous avons un dernier bouleversement complet de l’organisation territoriale. Nous trouvons beaucoup de petits sites mais les plus importants n’apparaissent que très peu sur notre carte, car ils se trouvent majoritairement sous les villages et villes modernes. C’est donc, dès le début de la période médiévale que commence à s’établir l’organisation territoriale que nous connaissons aujourd’hui pour la région prospectée.
L’objectif pour l’année 2021-2022 de la MAFGS est la publication de la première monographie de district.
Nous reprendrons la prospection dans les régions plus centrales du gouvernorat, Dukan et Soulaimaniah dès la fin de 2022.
Direction de la mission : Jessica Giraud, Archaïos CEO, chercheur attaché à l’UMR 7041, équipe VEPMO, et à l’Institut français du Proche-Orient (Ifpo) giraud.jessica@gmail.com
Co-direction : A. Ameen (Direction des Antiquités de Soulaimaniah) M. Mura (doctorante à l’université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne), M.-A. Pot (doctorante à l’Université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne )