Séances Séance du 11 mars

– Note d’information de M. Jacques Perot, sous le patronage de M. le Secrétaire perpétuel Michel ZINK : « Ostensions septennales limousines, patrimoine immatériel de l’humanité, 994-2016 ».

Résumé : Les ostensions limousines consistent en la présentation et la vénération de reliques de saints principalement limousins ou ayant vécu en Limousin. Elles remontent à 994, lorsque le “mal des ardents”, dû à un parasite du seigle, fut guéri par la “montre”, par l’abbé de Saint-Martial, à Limoges, des reliques du saint. Organisées de manière irrégulière au Moyen Âge sous le nom d’ostensions, attesté dès 1211, elles ont adopté au début du XVIe siècle un rythme septennal qu’on ne constate qu’en Limousin pour ce type de manifestation. Pratiques fortement ancrées dans la tradition et porteuses d’identité limousine, les ostensions se sont maintenues jusqu’à aujourd’hui, sans autre interruption, que, pendant la période révolutionnaire et, pour certains lieux comme Limoges, celle des luttes anticléricales de la fin du XIXe et du début du XXe siècle.

En 2016, sous la forme de fêtes religieuses et populaires, les ostensions, se dérouleront dans vingt lieux, dont 15 dans la Haute-Vienne, mais également dans la Creuse (2), en Charente, dans l’ancien diocèse de Limoges (2), et dans la Vienne (1), à Charroux, ancienne capitale du comté de la Marche, siège du concile de 989. Elles consisteront en de grandioses cérémonies et processions avec reliquaires, drapeaux, bannières, personnages historiques et, parfois, gardes d’honneur armées. Y participe la population locale, augmentée d’un afflux de personnes venues en pèlerins ou en spectateurs et de délégations des autres lieux organisateurs d’ostensions avec reliquaires et bannières.

Les ostensions ont lieu aujourd’hui à l’initiative de la population représentée par d’anciennes confréries et comités ostensionnaires. La Fédération des Confréries limousines est à l’origine de la candidature des ostensions, présentée par le Gouvernement français, à l’inscription sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité (UNESCO), qui fut acceptée le 4 décembre 2013 à Bakou.

Mots-clés : ostensions, ostensions septennales, Limousin, pratique religieuse, patrimoine immatériel,

Abstract: Ostensions consist of the ostension and the worship of relics of saints mainly from the Limousin or linked with the region. Ostensions go back to 994, when the “evil of the burning”, due to ergot, parasite in rye, was cured by the “show” by the abbot of Saint-Martial, in Limoges, of the saint’s relics. Episodically organised during the Middle-Ages, named “ostensions”, at least from 1211, they adopted at the beginning of the XVIth century a septennial rythm which exists only in Limousin. Strongly anchored in the tradition and bearers of Limousin identity, ostensions still persist today, only interrupted during the French Revolution, and, mainly in Limoges, at the time of anticlerical struggles of late XIXth and early XXth century.

During 2016, as religious and popular events, ostensions will take place in twenty places, 15 in Haute-Vienne, 2 in Creuse, 2 in Charente, in the former diocese of Limoges, and 1 in Charroux at one time capital of the County of Marche, where the 989 council took place.

They will consist of grand ceremonies and processions with reliquaries, flags, banners, great historical figures, sometimes armed guards. Take part in them or atttend to them the local population, increased by an influx of persons coming from elsewhere as pilgrims or spectators and from delegations of the other ostensions places with their reliquaries and banners.

Today ostensions are initiated by the people, through old Confraternities and Committees. Limousin Confraternities Federation is responsible for the nomination, submitted by the French Government, of ostensions to the Representative list of the Intangible Cultural Heritage of Humanity (UNESCO), which was accepted in Baku on the 4th December 2013.

Keywords : ostensions, septennial ostensions, Limousin, religious practice, Intangible Heritage,


– Communication de M. Dominique Poirel, directeur de recherche au CNRS (Institut de Recherche et d’Histoire des Textes), sous le patronage de MM. Yves-Marie BERCÉ et Jacques DALARUN : « Un écrit inédit de François d’Assise ? Le commentaire au Pater de Paris, Bibl. nat. de France, NAL 3245 ».

Résumé : Récemment acquis par la Bibliothèque nationale de France, le manuscrit NAL 3245 contient une nouvelle Vita de François d’Assise composée par Thomas de Celano (ff. 69r-79v) dont on doit à Jacques Dalarun la découverte et l’édition critique. Parmi les nombreux autres textes qu’il transmet, on remarque un commentaire inédit et original au Notre Père (ff. 43v-46v), dont l’édition critique, la recherche des sources et l’analyse littéraire, historique et doctrinale ont peu à peu fait surgir la question de son attribution à François d’Assise. Contre cette hypothèse, pourtant, les objections sont à la fois nombreuses et sérieuses : absence de rubrique dans le manuscrit unique ; absence du commentaire dans les corpus les plus sûrs ; existence dans ces mêmes corpus d’un commentaire concurrent au Pater, clairement attribué à François ; différences sensibles entre le texte en cause et les écrits de François quant au lexique et à l’usage de la Bible ; recours inhabituel à deux citations patristiques. À l’inverse, les arguments qui peuvent être formulés en faveur de l’attribution à François, à partir des sources extérieures, de l’étude du manuscrit et de l’analyse du texte lui-même, apparaissent bien faibles et relèvent moins de la déduction que de l’interprétation : le texte attire surtout l’attention par l’évidence d’une forte personnalité. Pesant le pour et le contre, on montrera que le commentaire étudié remonte probablement à la première génération des frères mineurs, qu’il pourrait être de leur fondateur lui-même et que, sous peine d’éviter les arguments circulaires, soit dans un sens, soit dans l’autre, il conviendrait de reprendre à nouveaux frais la critique d’attribution des écrits de François d’Assise.

Abstract  : A manuscript recently acquired by the BNF (NAL 3245) contains a new Vita of Francis of Assisi written by Thomas of Celano (ff. 69r-79v), which was identified and edited by Jacques Dalarun. Among the many other texts in the book, there is a previously unknown commentary on the Pater Noster (ff. 43v-46v). Its critical edition, source criticism, literary, historical and doctrinal analysis have progressively raised the question of its attribution to Francis of Assisi. Objections to this hypothesis are numerous and serious : the text is not attributed to Francis in the manuscript ; it is not found in the bona fide collections of Francis’ writings ; another commentary on the Pater, clearly attributed to Francis, does exist. Substantial differences exist between the anonymous commentary and the writings of Francis, in terms of vocabulary and the use of the Bible. Furthermore, the text contains two citations from patristic texts, which is quite unusual. Conversely, the arguments in favour of the attribution to Francis, which range from external sources to the study of the manuscript and the analysis of the text itself, appear very weak and more interpretative than deductive. The text is more notable for its reflection of the author’s strong personality. By weighing the pros and cons, we will show that the commentary probably dates back to the first generation of the Friars Minor, that it could indeed have been written by their founder and that, in order to avoid circular arguments, a new critical assessment should be made of the writings attributed to Francis of Assisi.