Travaux LE FONDS LOUIS ROBERT
Louis Robert
(1904-1985) fut l’un des plus grands savants français dans le domaine de l’Antiquité grecque. Élève de l’École Normale Supérieure (1924), membre de l’École Française d’Athènes (1927), directeur d’études de Géographie historique du monde hellénique à l’École Pratique des Hautes Études (Section des sciences historiques et philologiques) (1933), professeur d’Épigraphie et antiquités grecques au Collège de France (1939), membre de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres (1948) et de nombreuses académies étrangères, il eut une carrière académique fulgurante et prestigieuse, une réputation internationale incontestée, et forma quantité de jeunes savants français et étrangers venus suivre ses enseignements dans les deux grands établissements parisiens qu’il illustra.
Son nom est d’abord associé à l’épigraphie grecque, parce qu’il fut un maître incontesté dans l’édition et l’interprétation des inscriptions grecques, en particulier d’inscriptions fragmentaires qui paraissaient désespérées, mais dont il parvenait à établir la nature ou la provenance, et parce que le Bulletin épigraphique qu’il publia de 1938 à 1984 dans la Revue des Études grecques, avec la collaboration de son épouse, Madame Jeanne Robert, fut pendant près d’un demi-siècle un instrument de travail irremplaçable, redouté et admiré tout à la fois, où toute la production scientifique en ce domaine était, année par année, dépouillée et considérablement enrichie par des remarques critiques et des avertissements méthodologiques.
Mais Louis Robert fut, avant tout, un très grand historien, se distinguant par l’étendue de ses intérêts et l’extraordinaire maîtrise de sources dont il contribua, plus que tout autre, à montrer qu’elles ne pouvaient être correctement interprétées que par leur constante confrontation : inscriptions, mais aussi textes littéraires de toute sorte, récits de voyageurs, monnaies, reliefs figurés, monuments divers, qui toujours doivent être replacés dans leur contexte historique et géographique. L’un de ses plus grands mérites fut sans aucun doute cette lutte incessante pour briser le carcan de spécialités repliées sur elles-mêmes. L’autre fut d’avoir montré combien l’hellénisme, et la vie civique qui en était indissociable, continuaient à rester vivants aux époques hellénistique et romaine.
Louis Robert ne cessa de publier, avec régularité et abondance. Sa bibliographie compte plus de 460 numéros, depuis 1924 jusqu’à sa mort : de nombreux articles, repris dans les 7 volumes d’Opera minora selecta (1969-1990), les 13 volumes d’Hellenica (1940-1965), les Documents d’Asie Mineure (1985), des corpus par régions ou par sites (Le plateau de Tabai et ses environs, Les fouilles d’Amyzon en Carie), des monographies (Les Gladiateurs dans l’Orient grec, Noms indigènes dans l’Asie Mineure gréco-romaine, A travers l’Asie Mineure, Géographie et philologie, Le Martyre de Pionios, prêtre de Smyrne), etc. Malgré cette inlassable activité, et la précieuse collaboration de Jeanne Robert, nombreux sont les projets d’études ou d’ouvrages qu’il n’eut pas le temps de réaliser, mais pour lesquels il avait commencé à recueillir des notes et à regrouper les documents. D’autre part, Louis Robert ne fut pas un savant de cabinet. Au cours de nombreuses missions, d’abord seul dans les années 30, puis de 1946 à 1964 en compagnie de Madame Jeanne Robert, il explora méthodiquement l’Asie Mineure, multipliant les photographies, les relevés et estampages d’inscriptions. A quoi il faut ajouter les fouilles d’Amyzon en Carie, en 1949-1950, puis celles du sanctuaire d’Apollon à Claros, de 1950 à 1961, ainsi qu’une intense activité dans les musées turcs et leurs réserves. Les matériaux ainsi recueillis sont restés en partie inédits, bien que cette recherche sur le terrain n’ait cessé de nourrir les publications. En 1998, Madame Jeanne Robert a fait don à l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres d’un très important fonds d’archives et de documents (voir CRAI, 1998, p. 1137-1138). Pour accueillir ce trésor documentaire, le Secrétaire perpétuel de l’Académie Jean Leclant a obtenu de l’Institut les locaux nécessaires et les a fait aménager et meubler, opérations qui ont été menées à bien après de longues négociations et avec le soutien financier de l’Académie. Tous les éléments constituant le fonds sont désormais en place.
Le fonds Louis Robert
Ce fonds sera consultable sur demande dûment motivée. Il comprend essentiellement :- l’ensemble des dossiers constitués par Louis Robert, et formant des ensembles regroupés par thèmes, ou par régions, sites et catégories d’inscriptions.- les exemplaires de ses œuvres imprimées et des tirés à part de ses articles que Louis Robert conservait dans son bureau, et qui comportent des annotations et corrections de sa main.- un très précieux fonds documentaire composé de :
- carnets de voyages et de fouilles (incluant la totalité des carnets des fouilles de Claros)
- estampages. L’ensemble des estampages faits par Louis Robert, ou parvenus en sa possession, est maintenant conservé pour partie à l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres (Paris) et pour partie à l’Institute for Advanced Study (Princeton)
- monnaies et moulages de monnaies classés par cités
- photographies, pour la plupart prises par Louis Robert lui-même, y compris une petite collection de négatifs sur plaques de verre
- cartes, en particulier de la Turquie, y compris des séries de cartes réalisées en Allemagne à la fin du 19e siècle ou au début du 20e siècle
- correspondances scientifiques échangées avec des savants du monde entier
Ce fonds d’archives contient aussi des documents parvenus à Louis Robert, provenant en particulier de son maître Maurice Holleaux (1861-1932), dont il a republié les articles en six volumes d’Études d’épigraphie et d’histoire grecques, mais aussi des carnets de Georges Radet ou des estampages de Philippe Le Bas et de Charles Picard.